Débarras d’un logement Diogène : 10 étapes pour ne pas se tromper
Le syndrome de Diogène est une situation difficile, souvent bouleversante pour les proches. Face à un logement insalubre, encombré et parfois dangereux, il est naturel de se sentir perdu. Que faire ? Par où commencer ? Faut-il tout jeter ? Et la santé dans tout ça ?
Cet article vous guide étape par étape pour aborder sereinement le débarras d’un logement en situation de Diogène. Il ne s'agit pas de vendre un service, mais de vous apporter une méthode claire, humaine et efficace. Vous n’êtes pas seuls.
1. Comprendre ce qu’est le syndrome de Diogène
Avant toute action, il est essentiel de comprendre ce que vous affrontez. Le syndrome de Diogène est un trouble du comportement qui entraîne une négligence extrême de l’hygiène domestique et personnelle, souvent accompagné d’un isolement social, d’un refus d’aide et d’un comportement de thésaurisation compulsive (accumulation excessive d’objets).
Il touche souvent des personnes âgées, mais pas uniquement. Selon l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), il est parfois associé à d'autres troubles comme la dépression, les troubles cognitifs ou des traumatismes.
Ce n’est pas une question de paresse ou de volonté : c’est une pathologie qui demande une approche respectueuse et bienveillante.
2. Se protéger (physiquement et psychologiquement)
Un logement Diogène peut représenter un risque sanitaire réel. Il peut contenir :
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Des déchets en décomposition
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Des excréments humains ou animaux
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Des moisissures, bactéries et agents pathogènes
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Des risques de chute ou d’effondrement
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Des infestations (rats, cafards, punaises)
Avant d’intervenir, il est impératif de :
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Porter des équipements de protection individuelle (gants, masque FFP2, lunettes, combinaison jetable, chaussures fermées).
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Aérer au maximum le logement.
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Ne jamais toucher directement des objets souillés.
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Prévoir des temps de pause. L’impact émotionnel est souvent fort (odeurs, choc visuel, souvenirs familiaux).
Si la situation est critique, faites appel à un professionnel de santé pour évaluer les risques ou à l’ARS (Agence Régionale de Santé) pour signaler une insalubrité.
3. Impliquer les bons interlocuteurs
Avant de commencer à trier ou nettoyer, assurez-vous d’avoir le bon cadre légal et les bonnes personnes impliquées.
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Si vous êtes le tuteur légal, assurez-vous d’avoir les autorisations nécessaires (conseil de famille, juge des tutelles).
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Si vous êtes membre de la famille, vérifiez qui est responsable légalement du logement.
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Contactez la mairie si le logement présente un danger pour le voisinage (odeurs, risque d’incendie).
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En cas d’urgence ou de danger grave, les pompiers ou la police peuvent intervenir.
Sachez que selon l’INSEE, près de 10 % des logements sont considérés comme potentiellement indignes en France. Vous n’êtes pas dans une situation rare, ni isolée.
4. Faire un état des lieux précis
Il ne suffit pas de nettoyer : il faut évaluer.
Prenez le temps de :
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Photographier chaque pièce (utile pour les assurances ou organismes sociaux).
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Noter les zones les plus encombrées, les accès condamnés, les pièces dangereuses (sol effondré, fuite d’eau, etc.).
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Vérifier les installations électriques et la présence éventuelle de gaz.
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Repérer les documents officiels à préserver (papiers d’identité, assurances, titres de propriété).
Conseil : Utilisez un carnet ou une application de notes pour classer les informations par pièce et par type de contenu. Cela vous aidera à organiser le tri plus tard.
5. Évaluer l’état psychologique de la personne concernée
Le débarras ne peut pas être une opération brutale. Pour une personne atteinte du syndrome de Diogène, chaque objet accumulé peut avoir une signification symbolique, voire vitale. Jeter sans leur accord peut être vécu comme une agression.
Si la personne est encore sur place ou impliquée :
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Ne jugez jamais.
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Avancez avec diplomatie, par étapes, en l’impliquant autant que possible.
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Proposez une aide psychologique (médecin traitant, CMP - centre médico-psychologique, psychologue de secteur).
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Acceptez que cela prendra du temps.
Dans certains cas, une mesure de protection (curatelle, tutelle, hospitalisation temporaire) peut être demandée via un médecin ou un juge.
6. Planifier un tri en 3 zones
Une méthode simple pour avancer sans se perdre : le tri par zones.
Préparez 3 espaces bien distincts :
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À jeter : déchets, objets dangereux, détritus, denrées périmées.
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À conserver : objets de valeur, souvenirs, documents, bijoux.
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À recycler ou donner : vêtements, meubles récupérables, livres.
Conseils pratiques :
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Utilisez des sacs poubelle résistants (minimum 100L).
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Prévoyez un espace temporaire de stockage hors du logement si besoin.
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Marquez les objets ou cartons selon leur catégorie avec du ruban adhésif de couleur.
Important : Ne jetez rien qui pourrait avoir une valeur affective ou juridique sans l’avoir vérifié avec les ayants droit.
7. Organiser l’évacuation des déchets
Une fois le tri commencé, les volumes évacués peuvent être très importants. Une estimation réaliste pour un appartement Diogène de 50 m² peut atteindre plusieurs tonnes de déchets.
Options disponibles :
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Faire appel à la déchèterie locale (attention : certaines n’acceptent pas les déchets alimentaires ou sanitaires).
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Louer une benne (vérifier les autorisations de stationnement auprès de la mairie).
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Faire appel aux services de collecte des encombrants (variable selon les villes).
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Utiliser des sacs gravats ou big-bags pour les petits volumes.
Pensez aussi à séparer :
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Les déchets électroniques (DEEE)
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Les produits toxiques (batteries, solvants)
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Le textile
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Les objets recyclables (papier, plastique, verre)
Bon à savoir : Certains éco-organismes comme EcoDDS ou Ecosystem proposent des solutions de collecte gratuites pour certains produits.
8. Désinfecter et traiter les nuisibles
Une fois le logement vidé, l’état sanitaire nécessite souvent un traitement approfondi.
Actions à prévoir :
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Nettoyage à haute pression ou vapeur
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Désinfection des sols, murs, sanitaires, cuisines
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Traitement contre les nuisibles (insectes, rongeurs)
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Décontamination olfactive (ozone, produits enzymatiques)
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Traitement fongicide et bactéricide
Attention : Certains produits utilisés en désinfection peuvent être dangereux pour les animaux domestiques ou les personnes sensibles. Il est recommandé d’aérer plusieurs jours et de faire appel à des professionnels pour les traitements lourds.
9. Réhabiliter ou sécuriser le logement
Une fois propre, le logement n’est pas forcément habitable immédiatement. Il peut nécessiter :
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Des travaux de remise aux normes électriques ou sanitaires
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Le remplacement de sols/moquettes/moisissures
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Des réparations de plomberie, menuiseries ou toiture
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Un réaménagement de l’espace pour faciliter le quotidien de la personne
Si la personne est destinée à y retourner, il est crucial d’adapter l’environnement :
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Supprimer les zones de stockage inutiles
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Favoriser les meubles faciles à nettoyer
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Installer des détecteurs de fumée et des points lumineux efficaces
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Prévoir un suivi régulier
Dans certains cas, un relogement temporaire peut être préférable, voire permanent.
10. Mettre en place un accompagnement durable
Nettoyer une fois ne suffit pas. La rechute est fréquente si rien n’est mis en place ensuite.
Voici des pistes pour un accompagnement dans la durée :
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Aide à domicile (ménage, courses, visites régulières)
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Suivi psychiatrique ou psychologique
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Infirmier(e) à domicile si besoin
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Soutien social (CAF, assistante sociale, CCAS)
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Curatelle ou tutelle si justifiée
À Marseille comme ailleurs, des associations locales peuvent aider. N’hésitez pas à contacter :
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Le Centre Communal d’Action Sociale (CCAS)
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Le service hygiène de la ville
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L’ARS PACA
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Des associations comme France Alzheimer, Croix-Rouge, Les Petits Frères des Pauvres
Enfin, gardez en tête : ce n’est pas un sprint, c’est un chemin. Ce que vous faites est important, même s’il n’est pas parfait.
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Pour conclure
Le débarras d’un logement Diogène est un défi humain, sanitaire, logistique. Il demande de la patience, du respect, de l’organisation. Mais c’est possible. Et chaque pas compte.
Si vous êtes à Marseille ou dans la région, sachez que des ressources existent pour vous accompagner. N’agissez pas seul dans l’urgence. Appuyez-vous sur les services sociaux, médicaux, ou même des proches.
Ce n’est pas qu’un débarras : c’est souvent un premier pas vers une vie plus digne, pour la personne concernée et pour vous aussi.
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Sources :
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INSEE, Enquête logement 2020
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INSERM, Trouble du comportement et santé mentale
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Ministère de la santé, guide de l’insalubrité
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ANIL, Habitat indigne et insalubrité